mardi 7 août 2012

"Turandot" aux arène de Vérone 2012

Nous étions à la première ! Nous avons vu toute la journée les décors monumentaux se mettre en place, autour de l'arène, insérés par des grues ! Ça promettait !





Le soir venu une belle ambiance, était là. Il faisait chaud, le ciel était parfait. Lorsque vous êtes placés dans les "stalls", le dress code est strict : tenue de soirée/cocktail. Bref, ici on tient à ce que l'on s'habille bien pour venir à l'opéra.



La représentation a commencé à l'heure. Ce soir là, les magiciens étaient les suivant :

DIRECTION MUSICALE
Andrea Battistoni

MISE EN SCÈNE, SCÉNOGRAPHE
Franco Zeffirelli

COSTUMES
Emi Wada

CHORÉOGRAPHIE
Maria Grazia Garofoli

LUMIÈRE
Paolo Mazzon


Carlo Ventre
Nous pensions que sans non plus coller des micros aux chanteurs (pratique faussant les voix, et ne permettant pas une comparaison équitable des capacités des artistes), il y aurait des micros le long de la scène pour amplifier le volume général, mais non, c'était du 100% nature.
Et c'était un peu dur pour les oreilles, en effet, du 15ème rang bien en face, ce qui correspond à la première moitié proche de la scène, le volume était insuffisant, et la musique ne nous pénétrait pas. Cela tend à transformer l'opéra en spectacle musical et théâtral. Je pense que la musique doit être appréciée à un certain volume minimal pour faire vibrer notre être, c'est sensoriel et physiologique.


Amarilli Nizza
Le Calaf, Carlo Ventre le ténor uruguayen, un bon ténor qui fait bien son boulot, très bien même. Mais ses aigus se perdaient un peu dans le vide, et ne nous atteignaient pas comme le ruban vif et net qu'une voix doit être.
 
Liù, Amarilli Nizza, la milanaise,qu'on aurait eu beaucoup de mal à imaginer en pure et dévouée Liù, mais qui a tenu le rôle avec perfection, et surtout, avec une grande finesse. Son son a percé les coeurs. Voilà une femme qui prouve qu'elle sait endosser un personnage à l'opposé.


Giovanna Casolla
Et enfin Giovanna Casolla, qui nous a mitigé dans sa Turandot. Turandot, allias "le tombeau de la voix" est un rôle très difficile à chanter. CHANTER. C'est pourquoi beaucoup le hurle (comme récemment Lise Lindstrom à Orange... ). Giovanna Casolla a hurlé beaucoup de passage, et façon pas terrible puisque sa technique était dévoilée aux oreilles de tous par un hoquêtement d'attaque au début de chaque phrase. Forcément, avec ce traitement, la redescente aux mediums était très faible et inaudible (comme Lise Lindstrom à Orange). Cependant, dans les passages calmes et aigus, on entendait la très jolie voix de Mme Casolla. A propos, Mme Casolla a 67 ans ! Ce qui malgré tout force le respect. De plus donner (ou prendre) Turandot avant 40 ans, est bêtise et orgueil (comme Lise Lindstrom à Orange) car c'est un rôle pour un soprano dramatique plus qu'à maturité. Et pour ma part, je me fiche des jeunes chanteurs qui ont la grosse tête de voir cela comme un défi. L'opéra n'est pas un défi pour sa propre tronche, mais un honneur vis à vis des volonté d'un compositeur.
Ce qui m'a marqué dans la mise en scène, c'est le manque d'émotion, de geste, d'amour.
Le choeur très nombreux est chorégraphié dans le moindre détail et rend une masse fabuleuse, mais les personnages principaux... sont raides, font des gestes de bras... Le fameux baiser était affreux. Comme si les artistes étaient coincés devant un pupitre plus ou moins mouvant, ils ne vivaient clairement pas leur personnage. Ces personnages étaient sans personnalité.
Le tant attendu "Nessun Dorma" a été interprété avec brio par Carlo Ventre. Si bien, que les applaudissements n'ont même pas laissé l'orchestre finir le morceau, ce que je trouve très irrespectueux pour ces magiciens cachés dans la fosse.
Et là... "BIS !! BIS !! BIS!!", le public en voulait encore. Est-ce l'effet post-Alagna? Le fait de faire toutes les notes de Nessun Dorma est-il un exploit à présent? Je crois que oui. Moi il m'en aurait fallu plus, plus de tripes, plus de vibrant, j'aurais voulu que Carlos Ventre soit Le Calaf avec tout ce que ça implique.
Ils ont rejoué l'air. Et j'ai vu que les gestes de M. Ventre étaient exactement les mêmes. Pas de place à l'instinct.


Les décors et la dynamique générale auront été spectaculaire. Ca oui. Les costumes également. Une perfection. Bravo.
L'artiste la plus acclamée ce soir aura été Amarilli Nizza pour sa Liù. Comme quoi ce n'est pas forcément le rôle le plus long, le plus difficile et le plus présent sur scène qui peut marquer les coeurs, mais celui interprété avec le plus de sensibilité et de finesse. La voix de Nizza était comme un fil d'argent perçant la nuit au dessus des envolées de violons.

La soirée a été magique, et l'envie de revenir est là. Mais dans les tous premiers rangs, c'est sûr!